MPPP Ch.6 Sect.1 – LES EXCEPTIONS DE PROCÉDURE

janv.24

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Section 1

LES EXCEPTIONS DE PROCÉDURE

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I / DÉFINITION

Constitue une exception de procédure tout moyen qui tend à faire déclarer la procédure irrégulière, ou éteinte, ou à en suspendre le cours.

Les exceptions de procédure sont :

– l’exception d’incompétence

– l’exception de litispendance et de connexité

– l’exception dilatoire

– l’exception de nullité.

Les exceptions de procédure doivent, à peine d’irrecevabilité, être soulevées :

– avant toute défense au fond

– avant toute fin de non recevoir

– simultanément.

En matière prud’homale, les exceptions de procédure qui n’auraient pas été soulevées devant le bureau de conciliation et d’orientation peuvent l’être devant le bureau de jugement.

L’article R1451-2 du code du travail dispose à cet effet : “Les exceptions de procédure sont, à peine d’irrecevabilité, soulevées avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Elles peuvent, sous cette réserve, être soulevées devant le bureau de jugement. »

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Ordre de présentation

● Une partie n’est pas recevable à soulever une exception de procédure après une fin de non-recevoir, peu important que ces incidents aient été présentés dans les mêmes conclusions. (Cass. 2ème CIV. – 8 juillet 2004. N° 02-19.694. BICC 608 N° 1722 ).

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II/ EXCEPTIONS D’INCOMPÉTENCE

Le justiciable qui soulève l’incompétence (matérielle ou territoriale du conseil de prud’hommes saisi, oppose à cette fin l’exception d’incompétence. Il s’agit en général du défendeur qui se trouve attrait devant une juridiction qu’il n’a pas choisie à la différence du demandeur qui a présenté sa demande devant le tribunal qu’il estime compétent.

● L’exception d’incompétence matérielle ou territoriale est, quant à sa recevabilité et à son examen par le conseil de prud’hommes, soumise à un régime impératif.

L’incompétence peut être, d’après l’article 75 du code de procédure civile, soit soulevée par les parties, soit relevée d’office par le juge.

Article 75 du code de procédure civile: “S’il est prétendu que la juridiction saisie en première instance ou en appel est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit, à peine d’irrecevabilité, la motiver et faire connaître dans tous les cas devant quelle juridiction elle demande que l’affaire soit portée”.

● L’incompétence de section fait l’objet d’un régime différent, elle relève du pouvoir du président du conseil de prud’hommes qui statue par ordonnance non susceptible de recours (en vertu de l’article R1423-7 du code du travail).

Article R1423-7 du code du travail : “En cas de difficulté de répartition d’une affaire ou de contestation sur la connaissance d’une affaire par une section, le dossier est transmis au président du conseil de prud’hommes, qui, après avis du vice-président, renvoie l’affaire à la section qu’il désigne par ordonnance.
Cette ordonnance constitue une mesure d’administration judiciaire non susceptible de recours.
Les contestations sont formées devant le bureau de conciliation et d’orientation ou, dans les cas où l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, avant toute défense au fond.

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A / L’incompétence soulevée par les parties

La partie qui soulève cette exception, doit à peine d’irrecevabilité, la motiver et faire connaître, dans tous les cas, devant quelle juridiction elle demande que l’affaire soit portée. Cette indication qui est formelle ne liera pas le juge. Le fait que la juridiction indiquée dans l’exception ne soit pas celle qui, en définitive, sera reconnue compétente, ne peut influer sur sa recevabilité.

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B / Examen de l’exception

Il appartient au conseil de prud’hommes saisi de l’affaire et dont la compétence est contestée de se prononcer sur l’exception d’incompétence, selon la procédure qui lui est propre.

Le bureau de jugement se prononce d’abord sur la recevabilité de l’exception puis sur son bien-fondé et statue sur la demande de l’incompétence par un jugement motivé qui aura autorité de chose jugée si les parties n’exercent pas les recours qui leur sont ouverts.

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C/ Recevabilité de l’exception

En vertu des articles 74 et 75 du code de procédure civile, l’exception d’incompétence n’est recevable que si :

-elle est formulée avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir

-elle est motivée

-la partie qui la soulève fait connaître devant quelle juridiction doit être renvoyée l’affaire.

L’exception est irrecevable si elle est présentée après qu’il ait été conclu au fond, après que son auteur ait engagé la discussion au fond. De simples réserves sur la compétence n’équivalent pas à la formulation de l’exception et ne rendent pas recevable l’exception.

Devant le conseil de prud’hommes, l’exception peut encore être présentée devant le bureau de jugement.

L’instance au principal et l’instance en référé étant distinctes, l’exception est recevable quand bien même elle n’aurait pas été formulée devant la formation de référé.

Avant de se prononcer sur la question de compétence la juridiction peut prendre toute mesure d’instruction (audition de témoin, production de documents etc…) et inviter les parties à s’expliquer sur l’exception.

●La cour d’appel de Chambéry dans son arrêt du 02 mai l989 AGS/ROUX déclare un contredit (appel compétence) irrecevable au motif que le Conseil de Prud’hommes ne s’était pas déclaré compétent, fut-ce implicitement; qu’il pouvait rouvrir les débats et ordonner une mesure d’instruction concernant la question de fond sur l’existence d’un contrat de travail dont dépendait la compétence du conseil.

L’exception doit être motivée, son auteur doit fournir des arguments et doit indiquer devant quelle juridiction l’affaire doit être portée.

● La partie qui soulève l’incompétence d’une juridiction doit dans tous les cas et à peine d’irrecevabilité, désigner la juridiction qu’elle estime compétente et préciser en particulier la nature et le lieu de la juridiction revendiquée (Cass.Soc. 22/1/92 n̊90-41.599 -Bull. 1992 V N̊ 18 p. 12).

● Une partie qui n’a pas soulevé d’exception d’incompétence devant la juridiction de première instance n’est pas recevable à le faire pour la première fois en cause d’appel (Cass.Soc 05/01/95 – n̊ 92-19.823 – Bull. 95 – V  N̊ 3 p. 2).

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D/ Bien ou mal fondé de l’exception

Le conseil de prud’hommes appelé à se prononcer sur sa compétence peut :

-soit admettre le bien fondé de l’exception et de déclarer incompétent,

-soit rejeter cette exception et retenir sa compétence.

1°) Le bureau de jugement admet le bien fondé de l’exception et déclare le conseil de prud’hommes incompétent.

Aux termes de l’article 96 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge qui se déclare incompétent, désigne la juridiction compétente et cette désignation s’impose aux parties et au juge de renvoi. Toutefois si le juge estime que l’affaire relève de la compétence d’une juridiction pénale, administrative, arbitrale ou étrangère, il renvoie les parties à mieux se pourvoir. Cette décision peut être contestée par la voie du contredit.

2°) Le bureau de jugement rejette l’exception d’incompétence et se déclare compétent.

Le bureau de jugement qui rejette l’exception d’incompétence, peut statuer uniquement sur la compétence, alors même que les parties auraient plaidé subsidiairement sur le fond.

Le bureau de jugement qui ne statue que sur la compétence peut trancher accessoirement la question de fond dont dépend sa compétence (en matière prud’homale, il s’agira de l’existence d’un contrat de travail). Cette décision peut être contestée par la voie du contredit.

3°) Le bureau de jugement statue à la fois sur la compétence et sur le fond.

Le bureau de jugement peut dans un même jugement statuer sur sa compétence et sur le fond du litige, à la double condition:

-que les parties aient plaidé sur le fond (il arrive que les parties s’expliquent à titre principal sur l’exception et à titre subsidiaire sur le fond du litige pour éviter de se présenter deux fois devant la juridiction)

-que les conseillers se prononcent par des dispositions distinctes dans leur jugement.

Le juge peut, dans un même jugement, mais par des dispositions distinctes, se déclarer compétent et statuer sur le fond du litige, sauf à mettre préalablement les parties en mesure de conclure sur le fond (article 78 du code de procédure civile).

Article 78 du code de procédure civile: “Le juge peut, dans un même jugement, mais par des dispositions distinctes, se déclarer compétent et statuer sur le fond du litige, après avoir, le cas échéant, mis préalablement les parties en demeure de conclure sur le fond ».

Lorsqu’il ne se prononce pas sur le fond du litige mais que la détermination de la compétence dépend d’une question de fond, le juge doit, dans le dispositif du jugement, statuer sur cette question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes (article 79 du code de procédure civile).

Article 79 du code de procédure civile: “Lorsqu’il ne se prononce pas sur le fond du litige, mais que la détermination de la compétence dépend d’une question de fond, le juge doit, dans le dispositif du jugement, statuer sur cette question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes.
Sa décision a autorité de chose jugée sur cette question de fond”.

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Article 80 du code de procédure civile: “Si le juge se déclare compétent, sans statuer sur le fond, l’instance est suspendue jusqu’à l’expiration du délai pour former appel et, en cas d’appel, jusqu’à ce que la cour d’appel ait rendu sa décision”.

Article 81 du code de procédure civile: “Lorsque le juge estime que l’affaire relève de la compétence d’une juridiction répressive, administrative, arbitrale ou étrangère, il renvoie seulement les parties à mieux se pourvoir.
Dans tous les autres cas, le juge qui se déclare incompétent désigne la juridiction qu’il estime compétente. Cette désignation s’impose aux parties et au juge de renvoi”.

Article 83 du code de procédure civile: “Lorsque le juge s’est prononcé sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision peut faire l’objet d’un appel dans les conditions prévues par le présent paragraphe.
La décision ne peut pareillement être attaquée du chef de la compétence que par voie d’appel lorsque le juge se prononce sur la compétence et ordonne une mesure d’instruction ou une mesure provisoire”.

Article 84 du code de procédure civile: “Le délai d’appel est de quinze jours à compter de la notification du jugement. Le greffe procède à cette notification adressée aux parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. Il notifie également le jugement à leur avocat, dans le cas d’une procédure avec représentation obligatoire.
En cas d’appel, l’appelant doit, à peine de caducité de la déclaration d’appel, saisir, dans le délai d’appel, le premier président en vue, selon le cas, d’être autorisé à assigner à jour fixe ou de bénéficier d’une fixation prioritaire de l’affaire.

Article 85 du code de procédure civile: “Outre les mentions prescrites selon le cas par les articles 901 ou 933, la déclaration d’appel précise qu’elle est dirigée contre un jugement statuant sur la compétence et doit, à peine d’irrecevabilité, être motivée, soit dans la déclaration elle-même, soit dans des conclusions jointes à cette déclaration.
Nonobstant toute disposition contraire, l’appel est instruit et jugé comme en matière de procédure à jour fixe si les règles applicables à l’appel des décisions rendues par la juridiction dont émane le jugement frappé d’appel imposent la constitution d’avocat, ou, dans le cas contraire, comme il est dit à l’article 948.

Article 86 du code de procédure civile: “La cour renvoie l’affaire à la juridiction qu’elle estime compétente. Cette décision s’impose aux parties et au juge de renvoi.
Lorsque le renvoi est fait à la juridiction qui avait été initialement saisie, l’instance se poursuit à la diligence du juge.

Article 87 du code de procédure civile: “Le greffier de la cour notifie aussitôt l’arrêt aux parties par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Cet arrêt n’est pas susceptible d’opposition.
Le délai de pourvoi en cassation court à compter de sa notification.

Article 88 du code de procédure civile: “Lorsque la cour est juridiction d’appel relativement à la juridiction qu’elle estime compétente, elle peut évoquer le fond si elle estime de bonne justice de donner à l’affaire une solution définitive après avoir ordonné elle-même, le cas échéant, une mesure d’instruction.

Article 89 du code de procédure civile: “Quand elle décide d’évoquer, la cour invite les parties, le cas échéant par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à constituer avocat dans le délai qu’elle fixe, si les règles applicables à l’appel des décisions rendues par la juridiction dont émane le jugement frappé d’appel imposent cette constitution.
Si aucune des parties ne constitue avocat, la cour peut prononcer d’office la radiation de l’affaire par décision motivée non susceptible de recours. Copie de cette décision est portée à la connaissance de chacune des parties par lettre simple adressée à leur domicile ou à leur résidence.

Article 90 du code de procédure civile: “Lorsque le juge s’est déclaré compétent et a statué sur le fond du litige dans un même jugement rendu en premier ressort, celui-ci peut être frappé d’appel dans l’ensemble de ses dispositions.
Lorsque la cour infirme du chef de la compétence, elle statue néanmoins sur le fond du litige si la cour est juridiction d’appel relativement à la juridiction qu’elle estime compétente.
Si elle n’est pas juridiction d’appel, la cour, en infirmant du chef de la compétence la décision attaquée, renvoie l’affaire devant la cour qui est juridiction d’appel relativement à la juridiction qui eût été compétente en première instance. Cette décision s’impose aux parties et à la cour de renvoi.

Article 91 du code de procédure civile: “
Lorsque le juge s’est déclaré compétent et a statué sur le fond du litige dans un même jugement rendu en dernier ressort, celui-ci peut être frappé d’appel exclusivement sur la compétence. Un pourvoi formé à l’encontre des dispositions sur le fond rend l’appel irrecevable.
En cas d’appel, lorsque la cour infirme la décision attaquée du chef de la compétence, elle renvoie l’affaire devant la juridiction qu’elle estime compétente à laquelle le dossier est transmis à l’expiration du délai du pourvoi ou, le cas échéant, lorsqu’il a été statué sur celui-ci. La décision de renvoi s’impose aux parties et à la juridiction de renvoi.

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E/ L’incompétence relevée d’office

La juridiction saisie peut d’office se déclarer incompétente si la loi attribue compétence exclusive à une autre juridiction.

L’incompétence matérielle du conseil de prud’hommes peut être soulevée d’office s’agissant d’une violation d’une règle de compétence d’attribution définie par l’article L1411-1 du code du travail.

L’incompétence territoriale du conseil de prud’hommes ne peut être relevée d’office qu’en l’absence du défendeur.

Si les deux parties comparaissent, le conseil de prud’hommes saisi d’un litige qui relève de la compétence d’un autre conseil de prud’hommes ne peut d’office se déclarer incompétent, il ne peut le faire que si l’une des parties soulève cette incompétence.

Recours

Lorsque le juge se prononce sur la compétence sans statuer sur le fond du litige, sa décision ne peut être attaquée que par la voie de l’appel compétence (ex contredit), quand bien même le juge aurait tranché la question de fond dont dépend la compétence.

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F/ L’incompétence de section

Les affaires sont réparties entre les sections du conseil de prud’hommes en fonction de l’activité principale de l’employeur pour les sections INDUSTRIE, COMMERCE, AGRICULTURE et ACTIVITÉS-DIVERSES, et en fonction de la qualité de cadre du salarié pour la section ENCADREMENT.

Contestation de la compétence d’une section
<> Obligation de soulever l’incompétence de section devant le bureau de conciliation et d’orientation.
<> L’incompétence de section ne peut plus être soulevée devant le bureau de jugement sauf pour les affaires inscrites directement devant le bureau de jugement.

<>L’article R1423-7 du code du travail dispose <<En cas de difficulté de répartition d’une affaire ou de contestation sur la connaissance d’une affaire par une section, le dossier est transmis au président du conseil de prud’hommes, qui, après avis du vice-président, renvoie l’affaire à la section qu’il désigne par ordonnance.
Cette ordonnance constitue une mesure d’administration judiciaire non susceptible de recours.
Les contestations sont formées devant le bureau de conciliation et d’orientation ou, dans les cas où l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, avant toute défense au fond.
<> L’article R. 1423-7 du code du travail prévoit qu’une difficulté ou une contestation résultant de l’attribution des dossiers entre sections ne pourra dorénavant être soulevée que devant le bureau de conciliation et d’orientation dans la procédure de droit commun, et avant toute défense au fond lorsque le bureau de jugement est directement saisi. Aussi, une telle contestation ne peut être formée que tant que le bureau de conciliation et d’orientation est saisi du dossier aux fins de mise en état. Une contestation formée à l’audience du bureau de jugement est donc irrecevable. (Fiche du ministère 2016 Organisation et fonctionnement du conseil de prud’hommes).

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Selon la doctrine (JNA- N.C.P.C. commenté et LAMY PRUD’HOMMES n°105-8)
Les difficultés relatives à la compétence d’une section du Conseil de prud’hommes pour connaître d’une affaire, au regard de la qualité professionnelle des parties, ne constituent pas des exceptions d’incompétence au sens des articles 75 et suivants du code de procédure civile.
Faute de distinction dans le texte, on doit considérer que la contestation peut être soulevée par la section saisie, comme par les parties.

Le dossier est transmis en l’état au président du conseil de prud’hommes qui après avis purement consultatif du vice-président désigne la section compétente par ordonnance non susceptible de recours.

● La désignation par le président d’un conseil de prud’hommes de la section de cette juridiction compétente pour connaître d’un litige est une mesure d’administration judiciaire non susceptible de recours (Cass.Soc. 26/2/92 Bull. 92 V n° 135).

Arrêt de Chambre sociale de la cour de cassation du 26 février 1992
Sur le moyen unique :
Attendu que M. Chabert qui, par le jugement attaqué (conseil de prud’hommes de Manosque, 27 septembre 1990), a été condamné à payer diverses sommes à Mme Leroy, soutient que c’est à tort que la connaissance du litige l’opposant à cette ancienne salariée a été confiée à la section du commerce du conseil de prud’hommes alors que, l’intéressée étant cadre, l’affaire aurait dû être appelée devant la section de l’encadrement ;
Mais attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L. 515-4 du Code du travail que la désignation de la section compétente d’un conseil de prud’hommes pour connaître d’un litige est une mesure d’administration judiciaire non susceptible de recours; qu’il s’ensuit que le moyen ne peut être accueilli;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.
N° 90-45.510. Transports Chabert contre Mme Le Roy.Cass.Soc 26/02/92 Bull. 92 – V – n° 135

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III/ EXCEPTIONS DE LITISPENDANCE ET DE CONNEXITÉ

A/ Définition

Il y a litispendance lorsque deux instances identiques sont soumises à deux juridictions différentes, toutes deux compétentes pour en connaître. Plusieurs options de compétence territoriale étant offertes au demandeur salarié en vertu de l’article R1412-1 du code du travail, l’on peut rencontrer une situation dans laquelle le salarié a présenté une demande devant un conseil de prud’hommes tandis que l’employeur a saisi un autre conseil de prud’hommes.

Il y a connexité lorsque deux juridictions différentes et compétentes sont saisies de demandes qui n’étant pas identiques, présentent néanmoins des rapports étroits nécessitant qu’elles soient instruites et jugées ensemble dans l’intérêt d’une bonne justice.

B/ Application

Article 100 du code de procédure civile: “Si le même litige est pendant devant deux juridictions de même degré également compétentes pour en connaître, la juridiction saisie en second lieu doit se dessaisir au profit de l’autre si l’une des parties le demande. A défaut, elle peut le faire d’office.

Article 101 du code de procédure civile: “S’il existe entre des affaires portées devant deux juridictions distinctes un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l’une de ces juridictions de se dessaisir et de renvoyer en l’état la connaissance de l’affaire à l’autre juridiction.

Article 102 du code de procédure civile: “Lorsque les juridictions saisies ne sont pas de même degré, l’exception de litispendance ou de connexité ne peut être soulevée que devant la juridiction du degré inférieur.

Article 103 du code de procédure civile: “L’exception de connexité peut être proposée en tout état de cause, sauf à être écartée si elle a été soulevée tardivement dans une intention dilatoire.

Article 104 du code de procédure civile: “Les recours contre les décisions rendues sur la litispendance ou la connexité par les juridictions du premier degré sont formés et jugés comme en matière d’exception d’incompétence.
En cas de recours multiples, la décision appartient à la cour d’appel la première saisie qui, si elle fait droit à l’exception, attribue l’affaire à celles des juridictions qui, selon les circonstances, paraît la mieux placée pour en connaître.

Article 105 du code de procédure civile: “La décision rendue sur l’exception soit par la juridiction qui en est saisie, soit à la suite d’un recours s’impose tant à la juridiction de renvoi qu’à celle dont le dessaisissement est ordonné.

Article 106 du code de procédure civile: “Dans le cas où les deux juridictions se seraient dessaisies, la décision intervenue la dernière en date est considérée comme non avenue.

Article 107 du code de procédure civile: “S’il s’élève sur la connexité des difficultés entre diverses formations d’une même juridiction, elles sont réglées sans formalité par le président. Sa décision est une mesure d’administration judiciaire.

● Dès lors qu’il n’est pas contesté que les demandes de l’employeur d’une part et du salarié d’autre part dérivent du même contrat de travail, elles doivent faire l’objet d’une seule instance devant la juridiction prud’homale la première saisie.(Cass.Soc 26/11/87 Bull. 87 – V – n° 692).

Arrêt de Chambre sociale de la cour de cassation du 26 novembre 1987
Sur le premier moyen :
Vu les articles R. 516-1 du Code du travail et 100 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que la société des Laboratoires Anphar-Rolland a, à compter du 30 novembre 1982, retiré à la société Indice Recrutement le marché de prospection d’un produit pharmaceutique
pour assurer à l’avenir elle-même cette activité ; qu’elle a, par lettre du 19 novembre 1982, notifié à M. Dequidt son licenciement, tout en lui précisant qu’elle allait demander une autorisation administrative de licenciement ; que, par décision du 10 décembre 1982, l’administration a refusé d’autoriser le licenciement; que la société Indice Recrutement a attrait la société des Laboratoires Anphar-Rolland et M. Dequidt devant le conseil de prud’hommes de Paris pour voir dire que le contrat du salarié s’était continué dés le ler décembre 1982 avec la société des Laboratoires Anphar-Rolland; que M. Dequidt a présenté devant la même juridiction une demande reconventionnelle en rappel de salaires ; qu’il a ultérieurement saisi à titre principal le conseil de prud’hommes de Bethune à l’effet de faire juger que le contrat de travail le liant à la société Indice Recrutement avait été établi en violation des règles légales, que l’employeur réel était la société des Laboratoires Anphar-Rolland, et, à défaut voir condamner les deux sociétés à lui payer diverses indemnités de rupture ;
Attendu que pour rejeter l’exception de litispendance soulevée par la société Indice Recrutement au bénéfice du conseil de prud’hommes de Paris, juridiction première saisie, l’arrêt attaqué a retenu que le conseil de prud’hommes de Paris n’était pas compétent pour connaître du litige et qu’en conséquence il n’y avait pas en l’espèce litispendance , la condition de double compétence posée par l’article 100 du nouveau Code de procédure civile n’étant pas remplie;
Attendu cependant que, n’étant pas contesté que les demandes de la société Indice Recrutement, d’une part, et du salarié, d’autre part, dérivaient du même contrat de travail, elles devaient faire objet d’une seule instance devant le conseil de prud’hommes de Paris, juridiction première saisie ;
D’où il suit qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE l’arrêt rendu le 23 mai 1984, entre les parties, par la cour d’appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant
ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel d’Amiens.
N° 84-43.424. Société à responsabilité limitée Indice Recrutement contre société anonyme des Laboratoires Anphar-Rollnd et autre. Cass.Soc 26/11/87 Bull. 87 – V – n° 692

S’il existe entre des affaires portées devant deux conseils distincts un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble, il peut être demandé à l’un de ces conseils de se dessaisir et de renvoyer en l’état la connaissance de l’affaire à l’autre conseil (article 101 du code de procédure civile ).

● Il résulte de l’article 101 du code de procédure civile que la juridiction à laquelle est présentée une demande de renvoi pour connexité, a le devoir de rechercher si l’instance portée devant elle présente, avec une instance portée devant une autre juridiction, un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne administration de la justice de les faire instruire et juger ensemble.

En conséquence, la cour d’appel qui déclare mal fondé le contredit formé contre un jugement de conseil de prud’hommes ayant rejeté des exceptions de litispendance et de connexité avec un litige porté devant un autre conseil de prud’hommes, en raison de l’existence d’un lien de connexité entre deux instances, et juge néanmoins que la seconde juridiction saisie doit conserver la connaissance du litige porté devant elle, ne tire pas les conséquences légales de ses constatations. (Cass. Soc. 21/02/96 – Bull. 96 V n° 61).

Arrêt de la Chambre sociale de la cour de cassation du 21 février 1996
Vu leur connexité, joint les pourvois n° 92-14.104 et 92-14.105 ;
Sur le moyen unique, commun aux pourvois :
Vu l’article 101 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu qu’il résulte de ce texte que la juridiction à laquelle est présentée une demande de renvoi pour connexité, a le devoir de rechercher si l’instance portée devant elle présente, avec une instance portée devant une autre juridiction, un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, qu’après avoir attrait les époux Teillet devant le conseil de prud’hommes de Corbeil en leur réclamant l’indemnisation de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme Thiébaud a cité, aux mêmes fins, M. Diel et M. Meeus devant le conseil de prud’hommes de LongJumeau, qui a rejeté les exceptions de litispendance et de connexité soulevées par ces derniers ;
Attendu que, pour déclarer mal fondés les contredits formés par M. Diel et M. Meeus, l’arrêt énonce que le lien de connexité entre les instances pendantes devant les juridictions de Corbeil et de Longjumeau est seul évident ;
Qu’en statuant ainsi la cour d’appel, qui a affirmé l’existence d’un lien de connexité entre les instances et néanmoins jugé que la seconde juridiction saisie devait conserver la connaissance du litige porté devant elle, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations ;
Et attendu qu’en application de l’article 627, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile, la Cour de Cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 25 mars 1992, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;
DIT n’y avoir lieu à renvoi.
N° 92-43.104. M. Diel contre Mme Thiébaud.
N° 92-43.105. M. Meeus contre Mme Thiébaud. . (Cass. Soc. 21/02/96 – Bull. 96 V n° 61).

Lorsque les juridictions saisies ne sont pas de même degré, l’exception de litispendance ou de connexité ne peut être soulevée que devant la juridiction du degré inférieur (article 102 du code de procédure civile ).

L’exception de connexité peut être proposée par une des parties en tout état de cause, sauf à être écartée si elle a été soulevée tardivement dans une intention dilatoire (article 103 du code de procédure civile ).

Le recours contre les décisions rendues sur la litispendance ou la connexité par les juridictions du premier degré sont formés et jugés comme en matière d’exception d’incompétence (voir supra).

En cas de recours multiples, la décision appartient à la cour d’appel la première saisie qui, si elle fait droit à l’exception, attribue l’affaire à celle des juridictions qui, selon les circonstances, paraît le mieux placée pour en connaître (article 104 du code de procédure civile).

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IV/ EXCEPTIONS DILATOIRES

A/ Définition

L’exception dilatoire est un moyen de défense qui permet au défendeur de faire suspendre immédiatement le cours d’une instance pendant le délai nécessaire à l’accomplissement d’un acte juridique qui est susceptible d’influer sur le résultat du procès.

B/ Application

Le décret du 20 juillet 1972 permet de distinguer trois catégories d’exceptions dilatoires qui sont: le délai établi en faveur d’une partie, la suspension de l’instance en cas de recours exceptionnels, l’exception de garantie.

première exception dilatoire :

Le délai reconnu à l’héritier

Pour faire inventaire et délibérer. L’héritier dispose d’un délai de trois mois pour faire inventaire et d’un délai de 40 jours pour délibérer. Pendant ce délai, il peut renoncer à la succession et de ce fait ne plus avoir qualité pour être poursuivi.

En matière prud’homale, le cas le plus fréquent est celui de l’héritier de l’employeur qui se trouve cité en qualité de défendeur à l’action en paiement de salaire ou de dommages et intérêts et qui soulève l’exception.

● A l’expiration du délai pour faire inventaire et délibérer établi par l’article 795 du Code civil, le successible est tenu de prendre parti. A défaut il doit être condamné comme héritier pur et simple à l’égard du créancier successoral qui l’a poursuivi.

Dès lors, doit être condamné à l’égard de la Caisse, créancier héréditaire, l’héritier qui, à l’expiration du délai établi par l’article 795, n’a ni renoncé à la succession, ni sollicité un délai. (Cass.Soc 18/12/97 – Bull. 97 – V – n° 468)

Arrêt de la Chambre sociale de la cour de cassation du 18 décembre 1997
Sur le moyen unique :
Vu les articles 798, 800 et 870 du code civil ;
Attendu qu’il résulte du second de ces textes qu’à l’expiration du délai pour faire inventaire et délibérer établi par l’article 795 du Code civil, le successible est tenu de prendre parti et qu’à défaut, il doit être condamné comme héritier pur et simple à l’égard du créancier successoral qui l’a poursuivi ;
Attendu que Germaine Mouton est décédée le 13 mars 1986, avant d’avoir entièrement restitué à la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines une somme qu’elle avait reconnu avoir indûment perçue ; que le 24 juillet 1995, la Caisse a réclamé à l’un des héritiers, M. Drut, sa contribution à la dette;
Attendu que, pour débouter la Caisse de sa demande, le jugement attaqué énonce essentiellement que l’acceptation d’une succession ne se présumant pas, c’est au créancier héréditaire d’établir que l’ensemble des conditions de nature à lui permettre de réclamer paiement à l’héritier sont réunies et que l’organisme social n’établissant pas une acceptation tacite de la part de M. Drut, le seul fait que celui-ci n’ait pas renoncé à la succession de sa mère dans les formes légales n’était pas de nature à établir qu’il ait accepté cette succession ;
Qu’en statuant ainsi, alors que les délais de l’article 795 du Code civil étant expirés et M. Drut n’ayant ni allégué qu’il avait renoncé à la succession, ni sollicité un nouveau délai, il devait être condamné à l’égard de la Caisse qui l’avait poursuivi comme héritier pur et simple, le tribunal des affaires de sécurité sociale a violé les textes susvisés :
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 19 décembre 1995, entre les parties, par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valenciennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie
devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Douai
n° 96-11.793 Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines contre M. Drut
(Cass.Soc 18/12/97 – Bull. 97 – V – n° 468)

Le délai invoqué par un plaideur

L’article 108 du code de procédure civile permet au défendeur qui doit adopter une certaine attitude juridique, qui doit exercer une option, d’invoquer une exception dilatoire.

deuxième exception dilatoire : Suspension de l’instance en cas de certains recours exceptionnels

L’article 110 du code de procédure civile précise que « le juge peut suspendre l’instance lorsque l’une des parties invoque une décision frappée de tierce opposition, de recours en révision ou de pourvoi en cassation ».

La décision objet du recours doit être susceptible d’avoir une incidence sur la décision prud’homale pour pouvoir être invoquée.

troisième exception dilatoire: L’exception de garantie.

Un délai peut être sollicité pour appeler en cause un garant, un assureur notamment. L’article 109 du code de procédure civile énonce que le juge peut accorder un délai au défendeur pour appeler garant. Si le juge fait droit à l’exception, l’instance est suspendue jusqu’à l’expiration du délai dont dispose le garant pour comparaître. En matière prud’homale l’appel est garantie est peu fréquent.

V/ EXCEPTIONS DE NULLITÉ

A/ Définition

L’exception de nullité est un moyen de défense par lequel le défendeur invoque une violation de dispositions légales qui ont pour conséquences d’entraîner la nullité de la procédure. Elle doit être présentée à l’ouverture des débats.

● C’est à bon droit qu’une cour d’appel a, en application de l’article 430 du code de procédure civile, déclaré qu’était irrecevable une contestation afférente à la régularité de la composition du bureau de jugement du conseil de prud’hommes qui n’avait pas été présentée dès l’ouverture des débats, et refusé de prononcer la nullité du jugement.(Cass. Soc. 25/05/89 Bull. 89 V n° 402).

Arrêt de Chambre sociale de la cour de cassation du 25 mai 1989
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, que la société IMAC Universal Motors (société IMAC) fait grief à l’arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 30 juin 1986) d’avoir déclaré irrecevable le moyen soulevé par elle tendant à faire annuler un jugement du conseil de prud’hommes alors, selon le pourvoi, d’une part, que le conseil de prud’hommes était dans l’impossibilité légale de statuer en formation ordinaire présidée par un conseiller prud’homme qui avait été désigné en qualité de rapporteur par une précédente décision rendue par la formation de départage présidée par le juge d’instance lequel n’avait pas été dessaisi, et, d’autre part, que la cour d’appel a fait une fausse application de l’article 430 du nouveau Code de procédure civile qui dans son alinéa 3 énonce que les dispositions de l’alinéa 2 ne sont pas applicables lorsqu’il a été fait appel à une personne dont les fonctions ne sont pas celles qui l’habilitent à faire partie de la juridiction et que, en l’état, le conseiller prud’homme n’était absolument pas habilité à exercer les fonctions de président,
place réservée au juge départiteur ;
Mais attendu, d’une part, que le conseiller prud’homme désigné en qualité de rapporteur est habilité à faire partie de la formation de jugement après dépôt de son rapport, d’autre part, que le moyen développé par la société IMAC devant la cour d’appel s’analysant en une contestation afférente à la régularité de la composition du bureau de jugement du conseil de prud’hommes, c’est à bon droit qu’après avoir constaté qu’il ne résultait ni des énonciations du jugement, ni des pièces de la procédure et notamment des conclusions initiales et additionnelles de la société IMAC, que cette dernière ait présenté cette contestation dès l’ouverture des débats devant le conseil de prud’hommes, la cour d’appel a déclaré irrecevable cette contestation et a refusé de prononcer la nullité du jugement ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS:
REJETTE le pourvoi.
N° 86-44.415. Société IMAC Universal Motor contre M. Genthon
Cass. Soc. 25/05/89 Bull. 89 V n° 402

● L ‘exception de nullité est perpétuelle. (Cass. 1ère Civ 19/12/95 – Bull. 95, I, n° 477).

Arrêt de la 1ère chambre civile de la cour de cassation du 19 décembre 1995
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche:
Vu l’article 1304 du Code civil;
Attendu que l’exception de nullité est perpétuelle;
Attendu que, pour accueillir le moyen tiré par la société Jacques Gabriel de la prescription de la nullité opposée par M. Gougis à sa demande en paiement de frais de gestion afférents à un prêt immobilier, l’arrêt attaqué énonce que la contestation a été formée par M. Gougis plus de 5 années après la conclusion du prêt;
Attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que M. Gougis opposait la nullité par voie d’exception, la cour d’appel a violé le texte susvisé;
PAR CES MOTIFS:
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 26 octobre 1993, entre les parties, par la cour d’appel d’Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Bourges.
N° 94-10.812. M. Gougis contre societé Jacques Gabriel (Cass. 1ère Civ 19/12/95 – Bull. 95, I, n° 477)

B/ Nullité pour vice de forme

Un acte de procédure peut être déclaré nul lorsqu’une règle de forme, édictée à peine de nullité, n’a pas été respectée.

C/ Nullité pour violation d’une règle de fond

La violation d’une règle de fond constitue une nullité, même si la loi ne l’a pas forcément prévue.

Le code de procédure civile cite comme cause de nullité pour violation d’une règle de fond:

– le défaut de capacité d’ester en justice

– le défaut de capacité pur et simple

– la violation du principe du contradictoire

– l’omission du préliminaire de conciliation.

Celui qui invoque la violation d’une règle de fond n’est pas tenu de prouver qu’elle lui a causé un grief. Le juge peut la soulever d’office pour défaut de capacité d’ester en justice.

VI/ LE CRIMINEL TIENT LE CIVIL EN L’ETAT

A/ Principe

Lorsque le juge pénal et le juge civil sont saisis en même temps d’une action qui repose sur les mêmes faits, le juge civil doit attendre que le juge pénal ait statué avant de pouvoir statuer.

L’article 4 du code de procédure pénale dispose: » l’action civile peut être exercée séparément de l’action publique. Toutefois, il est sursis au jugement de cette action exercée devant la juridiction civile tant qu’il n a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ».

Depuis la loi du 5 mars 2007

L’article 4 du code de procédure pénale issu de la Loi nº 2007-291 du 5 mars 2007 art. 20 Journal Officiel du 6 mars 2007 dispose: “ L’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction prévue par l’article 2 peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l’action publique.

Toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement.

La mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature qu’elles soient, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer, directement ou indirectement, une influence sur la solution du procès civil. »

Précisions de la cour de cassation

● La mise en mouvement de l’action publique n’oblige la juridiction civile à surseoir à statuer sur les demandes dont elle est saisie qu’à la condition que le résultat de la procédure pénale en cours soit de nature à exercer une influence sur la solution du litige (Cass. Soc. 22 janvier 2008 N° de pourvoi : 06-42534) .

Arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 22 janvier 2008
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l’article 4 du code de procédure pénale, dans sa rédaction alors applicable, ensemble les articles L. 121-1 et L. 143-11-5 du code du travail ;
Attendu que la mise en mouvement de l’action publique n’oblige la juridiction civile à surseoir à statuer sur les demandes dont elle est saisie qu’à la condition que le résultat de la procédure pénale en cours soit de nature à exercer une influence sur la solution du litige ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que Mme X… a été engagée à compter du 1er juin 1998, en qualité de chargée de relations publiques, par la société de droit anglais Equinox Fortitude Ltd, exerçant une activité de conseil en organisation des sociétés au Canet-du-Roussillon ; qu’après l’ouverture en France d’une procédure de liquidation judiciaire à l’égard de cette société, le 2 décembre 1998, Mme X…, qui se plaignait du non-paiement de ses salaires depuis la date de son engagement, a saisi le conseil de prud’hommes de demandes tendant à obtenir le règlement de créances de salaires et d’indemnités ; qu’un premier jugement, rendu le 15 juin 2004, a sursis à statuer sur cette demande jusqu’à l’issue d’une procédure pénale en cours, faisant suite à une plainte avec constitution de partie civile de l’AGS, du chef d’escroquerie, dirigée contre les représentants en France de la société Equinox Fortitude ; qu’en juin 2004, Mme X… a saisi le conseil de prud’hommes d’une nouvelle demande ;
Attendu que, pour décider de surseoir à statuer sur les prétentions de la salariée, dans l’attente de la décision définitive de la juridiction pénale, la cour d’appel a retenu que la décision pénale qui interviendra sur la plainte de l’AGS ne sera pas sans incidence sur l’appréciation du caractère fictif ou non de l’activité de l’employeur, l’AGS étant, dans l’hypothèse d’une fictivité, fondée à soutenir ne pas devoir sa garantie ;
Qu’en statuant ainsi, alors que l’issue de la procédure pénale en cours n’était pas de nature à priver la salariée du bénéfice des créances résultant de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail, ni de la garantie prise en charge par l’AGS, dès lors qu’il n’était pas soutenu que l’intéressée ait participé au délit dénoncé dans la plainte pénale, la cour d’appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 15 mars 2006, entre les parties, par la cour d’appel de Montpellier ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Toulouse ;
Condamne M. Y…, ès qualités, aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille huit.
N° de pourvoi: 06-42534 Décision attaquée : Cour d’appel de Montpellier du 15 mars 2006

La règle selon laquelle le criminel tient le civil en l’état n’est pas applicable devant le juge des référés, dont les décisions, de caractère provisoire, sont dépourvues au principal de l’autorité de la chose jugée. (Cass.3e Civ. – 7 janvier 2009. N° 07-21.501. BICC 702 N°694).

● Le rappel à la loi auquel procède le procureur de la République en application de l’article 41-1 du code de procédure pénale est dépourvu de l’autorité de la chose jugée au pénal sur le civil et n’emporte pas par lui-même preuve du fait imputé à un auteur et de sa culpabilité.

Dès lors, n’encourt pas la censure la cour d’appel, statuant en matière prud’homale, qui, ayant apprécié souverainement les éléments de preuve produits, portant notamment sur les faits ayant donné lieu à un rappel à la loi, a estimé ces éléments insuffisamment probants. Soc. – 21 mai 2008. N° 06-44.948 BICC 689 n°1524).

Il n’est pas permis au juge civil de méconnaître ce qui a été jugé par le tribunal répressif

● Les décisions de la juridiction pénale ont au civil autorité de chose jugée à l’égard de tous et il n’est pas permis au juge civil de méconnaître ce qui a été jugé par le Tribunal répressif.

En conséquence, viole ce principe la cour d’appel qui pour condamner un employeur, qui a licencié un salarié, cuisinier dans un foyer éducatif au paiement d’indemnités de licenciement et de préavis, énonce qu’il n ‘est pas établi que des faits de vols de nourriture aient été commis par le salarié après un premier avertissement pour des faits de même nature, alors que, poursuivi devant le juge répressif il avait été condamné à réparer le préjudice subi par l’employeur et que la matérialité des faits ainsi que leurs dates étaient ainsi établies (Cass.Soc 10/12/91 – Bull. 91 – V – n°562).

Arrêt de la Chambre sociale de la cour de cassation du 10 décembre 1991
Sur le moyen unique
Vu le principe de l’autorité de la chose jugée au pénal sur l’action portée devant la juridiction civile;
Attendu que les décisions de la juridiction pénale ont au civil l’autorité de chose jugée à l’égard de tous et qu’il n’est pas permis au juge civil de méconnaître ce qui a été jugé par le Tribunal répressif;
Attendu que M. X…, engagé en 1974 par l’Association départementale des amis et parents d’enfants inadaptés (ADAPEI), en qualité de cuisinier, a fait l’objet d’un avertissement le 15 janvier 1986 pour avoir emporté de la nourriture du foyer à son domicile et a été licencié le 7 mai1986 pour indélicatesse et vols de nourriture;
Attendu que pour condamner l’association à payer au salarié des indemnités de préavis et de licenciement, la cour d’appel a relevé que, ayant fait l’objet d’un avertissement le 15 janvier 1986 pour avoir emporté de la nourriture, il n’était établi ni par le jugement prononcé le 20 septembre 1989 par le tribunal correctionnel ni par les attestation produites que des faits de même nature aient été commis par le salarié postérieurement à cette date ; qu’en statuant ainsi, alors qu’il résulte du jugement rendu par le tribunal correctionnel le 20 septembre 1989, que de septembre 1985 à mai 1986, le salarié avait soustrait des marchandises au foyer de l’ADAPEI et que ce jugement le condamnait à réparer le préjudice subi par l’employeur pendant 32 semaines, ce dont il s’ensuivait que la matérialité de faits postérieurs au 15 janvier 1986 était établie, la cour d’appel a violé le principe susvisé;
PAR CES MOTIFS:
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 22 juin 1990, entre les parties, par la cour d’appel de Besançon ; remet, en consequence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Dijon.
N° 90-44.351. Association départementale des amis et parents d’enfants inadaptés (ADAPEI) contre .M.X (Cass.Soc 10/12/91 – Bull. 91 – V – n°562).

● La règle «le criminel tient le civil en l’état» n’est pas une fin de non-recevoir que le juge serait tenu de relever d’office en raison de son caractère d’ordre public, mais constitue une exception tendant à suspendre le cours de l’action. La Cour d’Appel n ‘était donc pas tenue de surseoir à statuer dès lors qu’aucune demande en ce sens ne lui était soumise.(Cass. Soc. 06/02/96 – Cah.Prud’h. n°8 – 1996 p.129)

Arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 06 février 1996
Sur les divers moyens réunis tels qu’ils figurent au mémoire en demande et sont reproduits en annexe au présent arrêt:
Attendu que, a société Fune Fleurs fait grief à l’arrêt attaqué (Bastia, 15 septembre 1992) de l’avoir condamnée à payer à M.Toumi diverses sommes relatives à l’exécution et à la rupture du contrat de travail;
Mais attendu, d’abord, qu’il résulte des mentions de l’arrêt qui font foi jusqu’à inscription de faux, que la société, qui était appelante, bien que régulièrement convoquée, n’a pas comparu à l’audience de la Cour d’Appel, laquelle n’était dès lors saisie par la société d’aucun moyen;
Et attendu, ensuite, que la règle « le criminel tient le civil en état » n’est pas une fin de non-recevoir que le juge serait tenu de relever d’office en raison de son caractère d’ordre public, mais constitue une exception tendant à suspendre le cours de l’action; que la Cour d’Appel n’était donc pas tenue de surseoir à statuer dès lors qu’aucune demande en ce sens ne lui était soumise;
Que les moyens ne sont pas fondés;
PAR CES MOTIFS: REJETTE le pourvoi.
Sté FUNE FLEURS c/ M. TOUMI (Cass. Soc. 06/02/96 – Cah.Prud’h. n°8 – 1996 p.129)

● La perte de confiance n’est pas en soi une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Les juges du fond, dès lors qu’ils se fondent sur des faits dont est saisie la juridiction pénale, doivent surseoir à statuer jusqu’à ce que cette juridiction se soit prononcée.(Cass.Soc 12/03/91 – Bull. 91 – V – n° 127)

Arrêt de la Chambre sociale de la cour de cassation du 12 mars 1991
Attendu, selon la procédure, que M. Sapin, engagé en qualité de manipulateur-radio par la clinique Saint-Grégoire le 15 mars 1966, a été licencié pour faute grave par lettre du 11 février 1988;
Sur le premier moyen : (sans intérêt) ;
Mais sur le second moyen :
Vu l’article 4 du Code de procédure pénale;
Attendu que pour refuser de faire droit à la demande de sursis à statuer du salarié jusqu’à ce qu’il ait été statué au fond sur les plaintes avec constitution de partie civile qu’il avait déposées en dénonciation calomnieuse et en diffamation à l’encontre d’une cliente et patiente de la clinique, la cour d’appel a relevé après avoir souligné que la dite cliente avait déposé plainte pour faits d’attentats à la pudeur contre M. Sapin à la suite de laquelle l’intéressé avait été inculpé et renvoyé devant le tribunal correctionnel de Tours, a énoncé que l’article 4 alinéa 2, du Code de procédure pénale supposait que l’action civile trouve directement sa source dans l’infraction poursuivie, ce qui n’était pas le cas en l’espèce et qu’une relaxe sur le plan pénal ne saurait faire obstacle à ce que la juridiction civile saisie apprécie les mêmes faits sous l’angle de la responsabilité contractuelle;
Attendu cependant que la perte de confiance n’étant pas, en soi, une cause réelle et sérieuse de licenciement, la cour d’appel, dès lors quelle se fondait sur des faits dont était saisie la juridiction pénale, devait surseoir à statuer jusqu’à ce que cette juridiction se soit prononcée : qu’en statuant comme elle l’a fait elle a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que l’arrêt attaqué a refusé de surseoir à statuer, l’arrêt rendu le 6 octobre 1988, entre les parties, par la cour d’appel d’Orléans ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Bourges.
N° 88-45.431. M. Sapin contre clinique Saint-Grégoire. (Cass.Soc 12/03/91 – Bull. 91 – V – n° 127)

B/ Conditions

L’article 4 précité ne s’applique qu’à la double condition :

-qu’il s’agisse des mêmes faits

-que l’action publique soit effectivement engagée devant le tribunal compétent au moment où l’exception est soulevée devant le conseil de prud’hommes (l’action n est engagée que par le réquisitoire introductif du procureur de la République ou bien par une plainte avec constitution de partie civile).

Une plainte contre X ou une plainte simple n’engage pas l’action publique et ne peut entraîner l’application de l’article 4 du code de procédure pénale.

L’affaire pénale doit être de nature à exercer une influence sur la solution du litige.

● Prive sa décision de base légale une cour d’appel qui écarte une demande de sursis à statuer présentée sur le fondement de l’article 4 du code de procédure pénale sans s’expliquer sur les raisons pour lesquelles la décision pénale à intervenir n ‘est pas susceptible d’exercer une influence sur la solution de l’instance civile dont elle est saisie. (Cass. 2è Civ. 24/06/98 – Bull. 98 II n° 220).

Arrêt de la 2ème chambre civile de la cour de cassation du 24 juin 1998
Sur le moyen unique:
Vu l’article 4, alinéa 2, du code de procédure pénale, ensemble l’article 455 du nouveau code de procédure civile;
Attendu que les identités d’objet et de cause ne sont pas une condition d’application du premier des textes susvisés, lequel exige seulement que la décision à intervenir sur l’action publique soit susceptible d’influer sur celle qui sera rendue par la juridiction civile;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par acte du 9 juin 1993, M. Sibille a assigné devant le tribunal de grande instance M. Auque et Mme Pistolozzi, pour obtenir leur condamnation à lui payer 920 000 francs, correspondant au solde d’une somme de 1 200 000 francs, versée à M. Auque pour être placée auprès de Mme Pistolozzi en bons de caisse remboursables au 1er octobre 1993, et partiellement remboursée le
13 novembre 1992, par Mme Pistolozzi par un chèque de 200000 francs et le 16 novembre 1992 par M. Auque par un chèque de 80 000 francs, l’un et l’autre sur le Crédit agricole;
Attendu que pour écarter la demande de sursis à statuer présentée, sur le fondement de l’article 4 du Code de procédure pénale, par M. Auque, et condamner celui-ci seul au paiement réclamé par M. Sibille, la cour d’appel retient que si M. Auque justifie de l’instance pénale actuellement en cours, dans laquelle il a été mis en examen pour complicité d’escroquerie et d’exercice illégal de la profession de banquier commis par Mme Pistolozzi, poursuivie comme auteur principal, M. Sibille soutient qu’il n’est pas partie à cette procédure pénale et que le juge d’instruction n’est pas même saisi du litige, puisque c’est lui qui détient l’original du document intitulé « reçu des bons », signé par M. Auque et par Mme Pistolozzj, portant sur 1 200 000 francs; que, M. Auque ne démontre pas que la décision à intervenir sur l’action publique soit susceptible d’influer sur celle de la juridiction civile; que, l’action pénale, fondée sur la recherche d’auteur et de complice d’escroquerie ou d’exercice illégal de la profession de banquier, n’a pas la même cause que l’instance civile fondée sur une demande en paiement;
Qu’en se déterminant ainsi, tout en fixant à 920 000 francs le montant de la créance de M. Sibille, et sans s’expliquer sur les raisons pour lesquelles la décision pénale à intervenir n’était pas susceptible d’exercer une influence sur la solution de l’instance civile dont elle était saisie, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision;
PAR CES MOTIFS:
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 13 juin 1996, entre les parties, par la cour d’appel de Toulouse; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Limoges.
N° 96-l8.842. M. Auque contre M. Sibille et autre. (Cass. 2è Civ. 24/06/98 – Bull. 98 II n° 220).

C/ Devant le bureau de conciliation et d’orientation

Si l’exception est soulevée devant le bureau de conciliation et d’orientation elle ne produit aucun effet immédiat car le bureau de conciliation et d’orientation est compétent nonobstant toute exception de procédure.

L’article R1454-14 du code du travail dispose à cet effet: “Le bureau de conciliation et d’orientation peut, en dépit de toute exception de procédure et même si le défendeur ne comparaît pas, ordonner :
1̊ La délivrance, le cas échéant, sous peine d’astreinte, de certificats de travail, de bulletins de paie et de toute pièce que l’employeur est tenu légalement de délivrer ;
2̊ Lorsque l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable :
a) Le versement de provisions sur les salaires et accessoires du salaire ainsi que les commissions ;
b) Le versement de provisions sur les indemnités de congés payés, de préavis et de licenciement ;
c) Le versement de l’indemnité compensatrice et de l’indemnité spéciale de licenciement en cas d’inaptitude médicale consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle mentionnées à l’article L. 1226-14 ;
e) Le versement de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243-8 et de l’indemnité de fin de mission mentionnée à l’article L. 1251-32 ;
3̊ Toutes mesures d’instruction, même d’office ;
4̊ Toutes mesures nécessaires à la conservation des preuves ou des objets litigieux.
Au vu des pièces fournies par le salarié, il peut prendre une décision provisoire palliant l’absence de délivrance par l’employeur de l’attestation prévue à l’article R. 1234-9. Cette décision récapitule les éléments du modèle d’attestation prévu à l’article R. 1234-10, permettant au salarié d’exercer ses droits aux prestations mentionnées à l’article L. 5421-2.
Cette décision ne libère pas l’employeur de ses obligations résultant des dispositions des articles R. 1234-9 à R. 1234-12 relatives à l’attestation d’assurance chômage.
Elle est notifiée au Pôle emploi du lieu de domicile du salarié. Tierce opposition peut être formée par Pôle emploi dans le délai de deux mois”. (article R1454-14 ex art. R.516. 18 du code du travail) qui dispose: “Le bureau de conciliation peut, en dépit de toute exception de procédure et même si le défendeur ne se présente pas, ordonner :…/…”

Le bureau de conciliation peut exercer toutes ses prérogatives. L’exception est notée au procès-verbal pour être examinée par le bureau de jugement saisi sur renvoi de l’affaire en cas de non conciliation.

.

D/ Devant le bureau de jugement

L’exception doit être soulevée avant l’exposé de l’argumentation, c’est-à-dire avant de plaider. Celui qui soulève l’exception prend la parole en premier, il est demandeur à l’exception. L’autre partie s’exprime en deuxième, les conseillers doivent s’assurer que l’action publique est effectivement engagée. Il appartient au demandeur à l’exception d’apporter cette preuve.

E/ Acceptation

Si les conditions fixées par l’article 4 du code du procédure pénale sont réunies, la formation du conseil doit surseoir à statuer dans l’attente de la décision pénale, le sursis à statuer ne vaut que pour les demandes qui découlent de la qualification pénale (dommages et intérêts, préavis en cas de faute grave), une demande de salaire est immédiatement recevable. Dès que la décision pénale est rendue, l’affaire peut être réinscrite au rôle pour être examinée:

-s’il y a condamnation pénale le conseil de prud’hommes est lié par cette condamnation pour juger

-s’il y a relaxe, non lieu ou acquittement, le conseil de prud’hommes est souverain pour prendre la décision qu’il estime devoir prendre.

F/ Rejet

Si les conditions de l’article 4 du code de procédure pénale ne sont pas réunies ou bien si le demandeur à l’exception n’apporte pas la preuve de ses dires, le conseil est souverain pour juger l’affaire.

Plainte au pénal sans conséquence sur la décision du conseil des prud’hommes

● C’est à bon droit que la Cour d’Appel a décidé qu’il n’y avait pas lieu de surseoir à statuer dès lors que la plainte déposée par le salarié devant une juridiction n’était pas susceptible d’avoir une influence sur la décision prud’homale. (Cass.Soc. 10/12/91 – Cah.Prud’homaux n°5 – 1992 p.80).

Arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 10 décembre 1991
LA COUR:
Sur le premier moyen:
Attendu que M. Michard, engagé le 1er septembre 1975, en qualité de vendeur de joaillerie, par la société Chaumet, aux droits de laquelle vient la société Nouvelle Chaumet, a été licencié le 29septembre 1988, en raison de son refus d’accepter une modification de sa rémunération;
Attendu que le salarié fait grief à l’arrêt attaqué (Paris, 6 juillet 1990) d’avoir refusé de surseoir à statuer dans l’attente d’une décision pénale sur la plainte déposée par le salarié pour escroquerie au jugement, alors que, selon le moyen, d’une part, que la procédure prud’homale étant orale, la cour d’appel est tenue de répondre aux moyens développés à la barre quand bien même ils n’auraient pas été soutenus dans les écritures des parties ; que, dés lors, en refusant de surseoir à statuer aux motifs que la plainte dont elle a pourtant constaté la réalité, n’était pas mentionnée dans les écritures du salarié, la cour d’appel a violé l’article R. 516-6 du Code du travail ; alors, d’autre part, que le pénal tient le civil en l’état ; qu’en refusant de surseoir à statuer dans l’attente d’une décision définitive sur la plainte déposée contre X pour escroquerie au jugement, aux motifs qu’aucun élément ne permet de conclure qu’elle serait de nature à influer effectivement sur la solution du litige, sans préciser ni de quel jugement il s’agissait ni les éléments contenus dans la plainte, la cour d’appel n’a pas mis la Cour de Cassation en mesure d’exercer son contrôle et, partant, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 4 du Code de procédure pénale;
Mais attendu que la cour d’appel, ayant relevé que la plainte n’était pas susceptible d’exercer une conséquence sur la décision prud’homale, a légalement justifié sa décision; que le moyen n’est pas fondé;
Sur le second moyen:
Attendu que le salarié fait encore grief à l’arrêt de l’avoir débouté de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors que, selon le moyen, sous l’empire de l’article L. 122-14-2 du Code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 30 décembre 1986, l’énonciation des motifs de licenciement dans la lettre le notifiant lie le contentieux de telle sorte que l’employeur ne peut invoquer devant le juge des motifs qu’il n’a pas énoncé dans ladite lettre; que, dès lors, viole ce texte la cour d’appel qui, après avoir relevé que la société Nouvelle Chaumet n’avait pas fait référence à des difficultés économiques dans la lettre de notification du licenciement, ni même dans un courrier ultérieur répondant à une demande de notification des motifs du congédiement, considère néanmoins que le licenciement de l’exposant est justifié par les considérations économiques invoquées devant elle par l’employeur;
Mais attendu qu’il résulte des énonciations de la lettre de licenciement que celui-ci a été prononcé à la suite du refus par le salarié d’une modification substantielle du contrat de travail, consécutive à une réorganisation de l’entreprise ; que le moyen ri’est pas fondé;
PAR CES MOTIFS: REJETTE le pourvoi.
M. MICHARD c/ SA NOUVELLE CHAUMET (Cass.Soc. 10/12/91 – Cah.Prud’homaux n°5 – 1992 p.80).

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