MPPP Ch.3 Sect.12 – L’ ABSENCE DU DÉFENDEUR DEVANT LE BUREAU DE JUGEMENT

 

Section 12

 

L’ ABSENCE DU DÉFENDEUR

DEVANT LE BUREAU DE JUGEMENT

 

 

I / PRINCIPE

 

Nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée (art. 14 du code de procédure civile).

A moins qu’elles ne l’aient été verbalement avec émargement au dossier, les parties sont convoquées devant le bureau de jugement par lettre recommandée avec demande d’avis de réception et lettre simple (article R1454-19 ex art. R.516.26 du code du travail).

● Viole l’article 14 du code de procédure civile selon lequel nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée, le conseil de prud’hommes qui condamne un employeur au paiement de diverses sommes sans l’avoir convoqué devant le bureau de jugement (Cass.Soc. 2/6/92 Bull. 92 V n̊364).

 

 

II/ MODE DE COMPARUTION

 

En cas de motif légitime d’absence, le défendeur peut se faire représenter par une des personnes énumérée à l’article R1453-2 du code du travail (ex article R516-5 du code du travail et article 2 de la loi n 2007-1787 du 20 décembre 2007) qui dispose:

“Les personnes habilitées à assister ou à représenter les parties sont :

1̊ Les salariés ou les employeurs appartenant à la même branche d’activité ;

2̊ Les délégués permanents ou non permanents des organisations d’employeurs et de salariés ;

3̊ Le conjoint, le partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou le concubin ;

4̊ Les avocats.

L’employeur peut également se faire assister ou représenter par un membre de l’entreprise ou de l’établissement”.

 

L’absence du défendeur ( ni présent ni représenté) devant le bureau de jugement est régie par les articles 471 et 472 du code de procédure civile.

Article 471 « Le défendeur qui ne comparaît pas peut, à l’initiative du demandeur ou sur décision prise d’office par le juge, être à nouveau invité à comparaître Si la citation n’a pas été délivrée a’ personne. La citation est, sauf application des règles particulières a’ certaines juridictions, réitérée selon les formes de la première citation. Le juge peut cependant ordonner qu’elle sera faite par acte d’huissier de justice lorsque la première citation avait été faite par le secrétaire de la juridiction. La nouvelle citation doit faire mention; selon le cas, des dispositions des articles 472 et 473 ou de celles de l’article 474, alinéa 2. Le juge peut aussi informer l’intéressé, par lettre simple des conséquences de son abstention ».

 

Article 472 « Si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».

 

● C’est dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire que le conseil de prud’hommes a décidé de statuer sur le fond en l’état de la non-comparution du demandeur en audience de jugement. (Cass. Soc. 08/01/87 Cah.Prud’homaux 1987 n̊9 p.152).

 

Arrêt de Chambre sociale de la cour de cassation du 8 janvier 1987
Sur le moyen unique, pris de la violation de l’article 468 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que Monsieur Bouhanouf fait grief au jugement attaqué de l’avoir débouté de sa demande en paiement de salaires par application de l’article 468 du nouveau Code de procédure civile, alors que le principe du contradictoire a été ainsi violé puisque, d’une part, l’attitude du demandeur et l’assiduité dont il a fait preuve dans les précédentes phases de la procédure ne permettaient pas au juge de présumer un désintérêt soudain qui inexpliqué pour l’affaire, et que, d’autre part, le demandeur était retenu loin de son domicile par un motif légitime, en l’espèce une hospitalisation, constituant un cas de force majeure ayant empêché tant de comparaître de se faire représenter ;
Mais attendu que c’est dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire que le conseil de prud’hommes a décidé de statuer sur le fond, en l’état de la non-concurrence non comparution du demandeur ;
Par ces motifs : REJETTE le pourvoi
Cass. Soc. 08/01/87 Cah.Prud’homaux 1987 n̊9 p.152.

 

L’absence du défendeur ne justifie pas sa condamnation automatique.

Le bureau de jugement peut examiner l’affaire mais sa décision doit être motivée. En vertu de l’article 472 du code de procédure civile, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

 

● Encourt la cassation le jugement qui pour condamner un employeur défaillant en audience de jugement s’est borné au seul visa des documents produits par le demandeur sans en faire une analyse. (Cass. Soc. 15/01/87 Cah.Prud’homaux 1987 n̊8 p.130).

 

● La partie qui, bien que régulièrement convoquée, n ‘a pas comparu à l’audience tenue par le bureau de jugement du conseil de prud’hommes ne saurait se prévaloir de sa propre défaillance pour reprocher à celui-ci, qui n ‘était pas tenu de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure ni, à défaut, de réouvrir les débats, d’avoir fondé sa décision sur des éléments régulièrement fournis par l’autre partie. (Cass. Soc. 19/06/86 – Bull. 86 V n̊325).

 Arrêt de la chambre sociale de la cour de cassation du 19 juin 1986
Sur le premier moyen, pris de la violation des articles 14 et suivants, 132 et suivants du nouveau Code de procédure civile:
Attendu que le jugement attaqué a condamné le Laboratoire de Biologie médicale Coquard et Nodet à payer diverses sommes à son ancienne employée, Mme Gaunard; que MM. Coquard et Nodet, qui n’ont pas comparu à l’audience tenue le 20 décembre 1982 par le bureau du jugement du conseil de prud’hommes, font grief à celui-ci d’avoir fondé sa décision sur des conclusions qui ne leur sont parvenues que le 18 décembre ainsi que sur des pièces dont ils n’ont pas eu connaissance avant cette audience alors, d’une part, que leur conseil avait demandé, par voie de communication téléphonique avec le secrétariat-greffe, le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure, alors, d’autre part, qu’ils avaient, après la clôture des débats, sollicité la réouverture de ceux-ci et demandé que Mme Gaunard fût condamnée sous astreinte a leur communiquer lesdites pièces
Mais attendu que les juges du fond ont constaté que MM. Coquard et Nodet avaient été régulièrement convoqués à l’audience du 20 décembre ; qu’il s’ensuit qu’ils ont été mis en mesure de débattre contradictoirement lors de cette audience des moyens invoqués et des pièces produites par Mme Gaunard et qu’ils ne sauraient se prévaloir de leur propre défaillance pour reprocher au conseil de prud’hommes, qui n’était pas tenu de renvoyer l’affaire à une audience ultérieure ni, à défaut, de réouvrir les débats, d’avoir fondé sa décision sur des éléments régulièrement fournis par leur ancienne employée;
Que le moyen n’est donc pas fondé;
Et sur le second moyen, pris du défaut de motif et du manque de base légale:
Attendu qu’il est encore fait grief au jugement d’avoir alloué à Mme Gaunard des rappels de salaires et de primes, des complément d’indemnité de licenciement, d’indemnité compensatrice de préavis et d’indemnité compensatrice de congé payé, une indemnité pour refus de fourniture de blouses de travail, des dommages-intérêts et une indemnité au titre de l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, alors qu’il ne serait pas établi que ces sommes fussent dues à l’intéressée;
Mais attendu que, sous couvert de griefs non fondés de défaut de motif et de manque de base légale, le moyen ne tend qu’à remettre en discussion les éléments de fait du litige souverainement appréciés par les juges du fond;
Qu’il ne saurait donc être accueilli
PAR CES MOTIFS: REJETTE le pourvoi.
N̊ 83-41.455. Laboratoire de Biologie Médicale Coquard et Nodet contre Mme Gaunard.(Cass. Soc. 19/06/86 – Bull. 86 V n̊325).

 

 

III/ MOTIF LÉGITIME

 

Si le défendeur a fait connaître son motif légitime:

*avant l’audience par courrier, télégramme, télécopie, ou téléphone,

*ou bien à l’audience par la présentation d’un mandataire.

Les conseillers apprécient le motif légitime et renvoient l’affaire à une prochaine audience.

 

 

IV/ NOUVELLE DATE D’AUDIENCE

 

Le renvoi est une mesure d’administration judiciaire. Les parties en sont avisées par émargement (pour celle qui est présente à l’audience) et par lettre simple pour la partie absente.

 

 

V/ DÉFENDEUR NON JOINT

 

Si le défendeur n’a pas été joint pour les raisons suivantes :

● Accusé de réception non revenu au greffe.

● Lettre revenue avec mention « n’habite pas à l’adresse indiquée ».

Il faut reconvoquer le défendeur (le cas échéant à la nouvelle adresse que doit indiquer le demandeur) soit par lettre recommandée avec accusé de réception et lettre simple, soit par acte d’huissier de justice (à la charge de demandeur).

● Lettre recommandé non retirée.

L’article R1454-20 du nouveau code du travail (ex article R.516.26) prévoit qu’il faut reconvoquer lorsque le défendeur n’a pas été joint sans faute de sa part. A contrario, il n’y a pas lieu de reconvoquer quand le défendeur commet la faute de ne pas retirer la lettre recommandée avec accusé réception.

 

La circulaire 94-10 du 6 septembre 1994 précise qu’il appartient aux conseillers prud’hommes d’apprécier si le fait de ne pas retirer la lettre où de ne pas faire suivre son courrier constitue une faute ou non. Si les conseillers estiment qu’il y a faute, l’affaire est retenue, la citation est régulière.

 

Circulaire 94-10 du 06 septembre 1994
N̊ NOR : JUS C 94 20 450 C N̊ CIRCULAIRE ; 94-10
REFERENCE DE CLASSEMENT : Bureau C.3. GT-552/IL/MH
TITRE DETAILLE :Décret n̊ 94-618 du 18 juillet 1994 relatif à la procédure de convocation devant le bureau de jugement du Conseil de Prud’hommes et modifiant l’article R. 516-26 du Code du Travail.
Je souhaite appeler votre attention sur le décret n̊ 94-618 du 18 juillet 1994 publié au Journal Officiel du 23 juillet 1994, qui a pour objet de modifier la procédure de convocation des parties devant le bureau de jugement du Conseil de Prud’hommes régie par l’article R. 516-26 du Code du Travail,
Dans sa rédaction issue du décret n̊ 82-1073 du 15 décembre 1982, l’article R. 516-26 du Code du Travail prévoyait que le demandeur et le défendeur devaient être convoqués par le Secrétariat-Greffe devant le bureau de jugement du Conseil des Prud’hommes verbalement avec émargement au dossier, ou par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, doublée d’une lettre simple.
– L’article 516-26 du Code du Travail ne prévoyait aucune autre modalité de convocation lorsque le défendeur n’avait pu être joint sans faute de sa part. En revanche, l’article R. 516-17 du même code, applicable à la procédure suivie devant le bureau de conciliation du Conseil des Prud’hommes dispose, que dans un tel cas, l’intéressé doit être reconvoqué.
L’absence de disposition particulière, conduisait à faire application de la règle de droit commun prévue par l’article 670-1 du nouveau code de procédure civile, qui édicté qu’en cas de retour au secrétaire de la juridiction d’une lettre de notification n’ayant pu être remise à son destinataire, le secrétaire invite la partie à procéder par voie de signification.
Le recours à la signification, ainsi rendu automatique par l’application du droit commun et qui trouve sa justification dans la nécessité de veiller au respect des principes du contradictoire et des droits de la défense en s’assurant que ,1e défendeur a bien reçu connaissance de la convocation, présente toutefois l’inconvénient d’entraîner des frais supplémentaires pour le demandeur, notamment en cas de refus dilatoire du défendeur de retirer une lettre recommandée.
L’article R. 516-26 nouveau étend donc en l‘adaptant à la convocation devant le bureau de jugement la procédure de convocation prévue par l’article R. 516-17 du code du travail, et prévoit désormais dans son troisième alinéa que, si au jour fixé pour le jugement le défendeur ne comparait pas, il est statué sur le fond sans qu’il soit nécessaire de procéder à nouveau par voie de signification.
– En conséquence, et si le défendeur ne comparait pas sur deuxième convocation, la détermination de la nature du jugement rendu se fera par référence aux dispositions de l’article 473 du nouveau code de procédure civile ; la décision sera ainsi considérée comme rendue par défaut si elle est en dernier ressort et si la convocation n’a pas été délivrée à personne ; elle sera réputée contradictoire lorsqu’elle sera susceptible d’appel ou lorsque la convocation aura été faite à la personne du défendeur, étant rappelé qu’en matière prud’homale, la convocation a valeur de citation.
– Si le défendeur a justifié en temps utile d’un motif légitime, le nouvel alinéa 2 de l’article R. 516-26 du Code du Travail prévoit qu’il sera convoqué à une prochaine audience du bureau de jugement par lettre recommandée.
L’existence d’une « faute » de la part du défendeur (par exemple un refus délibéré de retirer une lettre recommandée) relève de l ‘appréciation de la juridiction dans les mêmes conditions qu’en ce qui concerne l’application de la procédure de convocation des parties devant le bureau de conciliation du Conseil de Prud’hommes, prévue par l’article R. 516-17 du Code du Travail.
S’agissant d’un texte de procédure, cette réforme est immédiatement applicable.
Vous voudrez bien trouver ci-joint en annexe copie du décret n̊ 94-618 du 18 Juillet 1994.
Je vous serai obligé de bien vouloir me faire connaître les difficultés que pourrait présenter l’application de ces dispositions.
Le Directeur des Affaires Civiles et du Sceau
Alexandre BENMAKHLOUF

 

 

VI/ DÉFENDEUR RÉGULIÈREMENT CONVOQUÉ

 

Si le défendeur a été convoqué régulièrement:

-par émargement,

-par lettre recommandée avec avis de réception et lettre simple,

-par huissier,

l’affaire peut être examinée. Le conseil de prud’hommes statue sur les éléments fournis par le demandeur. Toutefois, le bureau de jugement ne pourra examiner que les chefs de demande dont le défendeur a eu connaissance par sa convocation. Toute demande nouvelle doit être notifiée au défendeur avant l’audience pour pouvoir être examinée en son absence.

 

Si la convocation est revenue avec la mention « non réclamée », les conseillers peuvent retenir l’affaire s’ils considèrent que le défendeur a commis la faute de ne pas retirer la lettre en application de l’article R1454-20 du code du travail (ex art. R.516.26) qui exige une nouvelle convocation lorsque le défendeur n’a pas été joint sans faute de sa part .

 

2 réponses à MPPP Ch.3 Sect.12 – L’ ABSENCE DU DÉFENDEUR DEVANT LE BUREAU DE JUGEMENT

  1. Claude BASTARD dit :

    Celui qui fait appel est le demandeur devant la cour d’appel (peut importe qu’il soit demandeur ou défendeur devant le conseil de prud’hommes)
    L’autre partie devient défendeur devant la cour d’appel et porte le nom d’intimé.

  2. vallee dit :

    Bonjour

    pourriez vous me dire qui est le défendeur devant la cour d’appel ?
    en effet je ne parviens pas à savoir si le demandeur devant le conseil des prud’hommes devient le défendeur au sens de l’article 469 du Cpc si c’est l’adversaire (donc défendeur en première instance) qui fait appel de la décision.

    Je vous remercie de votre réponse

    maryse vallee

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