MPPP Ch.4 Sect.4 – DISTINCTION ENTRE INCOMPÉTENCE ET IRRECEVABILITÉ

 

Section 4

 

DISTINCTION ENTRE INCOMPÉTENCE ET IRRECEVABILITÉ

 

 

Il ne faut pas confondre les notions d’incompétence et d’irrecevabilité. La formation de référé peut se déclarer compétente mais juger que la demande est irrecevable car excédant les pouvoirs qui lui sont dévolus.

 

 

I/ COMPÉTENCE OU INCOMPÉTENCE

 

Les dispositions qui régissent l’incompétence d’attribution ou l’incompétence territoriale sont fixées par les articles 74 à 99 du code de procédure civile et par l’article R1451-2 (ex art.R.516.38) du code du travail (voir supra chapitre 3).

 

 

II/ RECEVABILITÉ OU IRRECEVABILITÉ

 

L’examen de la recevabilité d’une demande en référé est un préalable obligatoire à la décision.

 

Pour être recevable, la demande doit :

➜ Porter sur le litige individuel né à l’occasion du contrat de travail, (les litiges collectifs ne peuvent être examinés par le conseil de prud’hommes).

 

➜ Porter sur des mesures conformes à l’article 484 du code de procédure civile, c’est-à-dire: *des mesures provisoires qui ne préjugent pas du fond du litige,

*des mesures nécessaires (préparatoires ou conservatoires) conformes à la loi. La formation de référé ne peut se substituer au bureau de jugement pour trancher un litige au principal.

 

➜ Porter sur des mesures urgentes (voir supra section 2 la notion d’urgence) toutefois l’urgence n’est pas exigée en matière de référé provision, l’article R1455-7 (ex art.R.516.31) du code du travail n’exigeant qu’une absence de contestation sérieuse. L’urgence n’est pas non plus requise pour les mesures préparatoires de l’article 145 du code de procédure civile.

 

➜ Porter sur des mesures non sérieusement contestables, s’agissant d’une provision sur salaire ou accessoire de salaire. La formation de référé ne doit pas déduire de l’absence du défendeur, le fait qu’il acquiesce à la demande. Elle doit vérifier l’absence de contestation sérieuse et le bien-fondé de la demande.

 

➜ Porter sur la nécessité de prévenir un dommage imminent ou sur celle de faire cesser un trouble manifestement illicite. Dans ce cas la notion de contestation est sans objet en raison des dispositions de l’article R1455-6 (ex art. R.516.31) du code du travail qui dispose : “La formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite”.

 

Sont exclus les litiges suivants :

-contentieux des grèves et lock-out

-contentieux relatifs aux occupations de locaux

-contentieux relatif aux activités syndicales

-contentieux relatif au comité d’entreprise

-les mesures conservatoires requises par l’inspecteur du travail en matière d’hygiène et de sécurité

-les litiges relatifs au contrat de salaire différé (la compétence relevant du tribunal d’instance)

-l’annulation d’une sanction

-les litiges concernant les capitaines de navire (compétence du tribunal de commerce)

-les litiges entre armateurs et marins en mer (compétence du tribunal d’instance)

-les litiges concernant les agents commerciaux ou les gérants non salariés (compétence du tribunal de commerce ou de grande instance)

-les litiges relatifs au logement de fonction après la rupture du contrat de travail (compétence du tribunal d’instance)

-les litiges concernant les journalistes ayant plus de quinze ans de métier (la compétence

relevant d’une commission d’arbitrage -articles L7111-1 (ex art.L.761.l) et suivants du code du travail-)

-les litiges relatifs au paiement des créances par l’A.G.S., en cas de redressement ou de liquidation judiciaire.

 

Arrêt de Chambre sociale de la cour de cassation du17 juin 1992
Sur le premier moyen :
Vu l’article 126 de la loi n̊ 85 – 98 du 25 janvier 1985 ;
Attendu que, selon ce texte, les litiges soumis au conseil dans une homme concernant des créances salariales et opposant les salariés, d’une part, au représentant des créanciers, d’autre part, à l’AGS sont portés directement devant le bureau de jugement ;
Attendu que le conseil de prud’hommes, statuant en référé, a accordé une certaine somme à titre de provision pour licenciement abusif à Monsieur Regeamortel, salarié de la société Joël Izar qui avait été mise en liquidation judiciaire;
Qu’en statuant ainsi, alors que la saisine directe du bureau de jugement prévue à l’article 126 de la loi du 25 janvier 1985 excluaient toute possibilité de s’adresser des référés pour obtenir une provision, le conseil de prud’hommes a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions ; l’ordonnance rendue le 7 avril 1989, entre les parties, par le conseil de prud’hommes de Meaux
Dit n’y avoir lieu à renvoi.
Cass. Soc. 17/06/92 Bull. 92 V n̊ N̊ 406

 

 

III/ DÉSISTEMENT

 

● Le désistement d’une instance introduite devant la formation de référé prud’homal, lorsqu’il n’est pas accompagné d’un désistement d’action clair et non équivoque, laisse intact le droit d’agir devant la formation de jugement du conseil de prud’hommes (Cass.Soc 12/01/93 Bull. 93 – V – n̊ 5).

 

Arrêt de la Chambre sociale de la cour de cassation du 12 janvier 1993
Sur le moyen unique :
Vu l’article 398 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué et les pièces de la procédure, que Mme Cafasso, qui avait été mise à pied à la suite de son refus d’accepter l’emploi offert par son employeur lors de sa reprise de travail après un congé post-natal, a attrait la Compagnie méditerranéenne des cafés (CMC) devant la formation de référé du conseil de prud’hommes en formulant divers chefs de demande ; que l’employeur ayant, à l’audience de la formation de référé, remis un bulletin de salaire et le chèque correspondant à l’indemnité de congés payés, Mme Cafasso s’est désistée de ses autres demandes et qu’est intervenue, le 6 octobre 1983. une ordonnance prenant «acte delà transaction intervenue à ce jour»; que le 28 novembre 1983, Mme Cafasso a fait citer devant le conseil de prud’hommes, la CMC, à qui elle a réclamé diverses indemnités à la suite de la rupture, qu’elle estimait abusive, de son contrat de travail ;
Attendu que pour déclarer irrecevables les demandes, autres que celle de prime annuelle, l’arrêt infirmatif attaqué énonce que la transaction constatée par l’ordonnance de référé du 6 octobre 1983, et que Mme Cafasso ne conteste pas, entraîne nécessairement, lorsque, comme en l’espèce, le litige est né, non seulement désistement d’instance mais encore désistement d’action ; qu’elle a, en outre, entre les parties, l’autorité de la chose jugée en dernier ressort, conformément aux dispositions de l’article 2051 du Code civil et qu’ainsi ne peuvent plus être remises en question les demandes relatives à la rupture du contrat de travail, les indemnités de préavis et de licenciement, ainsi que l’indemnité de congés payés, qui faisaient partie de l’objet de la transaction ;
Attendu, cependant, que le désistement d’une instance introduite devant .la formation de référé prud’homal, lorsqu’il n’est pas accompagné d’un désistement d’action clair et non équivoque, laisse intact le droit d’agir devant la formation de jugement du conseil de prud’hommes ;
Qu’en statuant comme elle l’a fait. alors que par l’ordonnance du 6 octobre 1983. la formation de référé, bien qu’ayant dit, improprement, prendre acte d’une transaction, s’était bornée à constater le désistement du demandeur de l’instance en cours, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes relatives à la rupture du contrat de travail, aux indemnités de préavis et de licenciement et à l’indemnité de congés payés, l’arrêt rendu le 27 janvier 1988, entre les parties, par la cour d’appel d’Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Nîmes.
N̊ 88-43.754. Mme Cafasso contre Compagnie méditerranéenne des cafés.(Cass.Soc 12/01/93 Bull. 93 – V – n̊ 5).

 

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