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JURISPRUDENCE RECENTE

EN DROIT DU TRAVAIL

 

1-Une succession de CDD, sans délai de carence, n’est licite, pour un même salarié et un même poste, que si chacun des contrats a été conclu pour l’un des motifs prévus limitativement par l’article L. 1244-4 du Code du travail. (Cass. soc., 30 sept. 2014, n° 13-18.162)

Le salarié engagé , du 21 juin au 3 octobre 2010, dans le cadre d’un premier CDD motivé par un accroissement temporaire d’activité, puis d’une succession, du 25 octobre 2010 au 27 mars 2011, de CDD pour le remplacement de salariés absents a obtenu la requalification des ses cdd en cdi parce que l’employeur n’avait pas respecté le délai de carence après le CDD d’accroissement d’activité.

 

2- Un contrat saisonnier, au risque d’une requalification, doit mentionner un terme précis ou une durée minimale, conformément à l’article L. 1242-12 du Code du travail. (Cass. soc., 30 sept. 2014, n° 13-13.522)

La spécificité d’une activité saisonnière, réside entre autres dans l’aléa existant quant à la durée de la saison. La cour impose de respecter les conditions de conclusion et d’exécution d’un contrat de travail à durée déterminée, à savoir soit un terme précis (contrat de date à date pour la durée présumée de la saison ou à l’intérieur de la saison), soit, à défaut, une durée minimale (C. trav., art. L. 1242-12).

3- Formation professionnelle: L’obligation de veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi relève de l’initiative de l’employeur. (Cass. soc., 18 juin 2014, n° 13-14.9169)

Plusieurs salariés avaient saisi la juridiction prud’homale de demandes notamment de dommages-intérêts au titre du manquement de l’employeur à son obligation de formation. La cour d’appel avait rejeté les demandes au motif que  les salariés n’avaient émis aucune demande de formation au cours de l’exécution de leur contrat de travail. La cour de cassation a cassé la décision au motif que l’obligation de veiller au maintien de la capacité des salariés à occuper un emploi relève de l’initiative de l’employeur.

 

4- Refuser une formation qualifiante à un salarié en raison de son âge constitue une discrimination. En vertu de l’article L. 1132-1 du Code du travail, aucune personne ne peut faire l’objet d’une mesure de discrimination, directe ou indirecte, notamment en matière de formation, de qualification ou de promotion professionnelle, en raison de son âge.

Le refus de formation opposé à un pilote de ligne au motif qu’il a atteint l’âge de cinquante-neuf ans caractérise une discrimination fondée sur l’âge constitutive d’un trouble manifestement illicite dès lors que l’employeur n’apporte aucun élément objectif pour justifier sa décision. (Cass. soc., 18 févr. 2014, n° 13-10.294)

 

 5- Le temps de trajet pour se rendre d’un lieu de travail à un autre lieu de travail constitue un temps de travail effectif. (Cass. crim., 2 sept. 2014, n° 13-80.665).

 

6- L’absence d’entretien préalable, dû au fait que ni le salarié, ni l’employeur ne se sont allés au rendez-vous, ne rend pas irrégulière la procédure de licenciement. (Cass. soc., 17 sept. 2014, n° 13-16.756).

L’employeur qui envisage de procéder au licenciement d’un salarié doit le convoquer, avant toute décision, à un entretien préalable par courrier adressé en recommandé ou remis en mains propres contre décharge (C. trav., art. L. 1232-2).

L’employeur est tenu d’organiser cet entretien pour exposer au salarié les motifs du licenciement envisagé et entendre ses explications, le salarié.

Le salarié n’est pas tenu de s’y présenter.

En ne se rendant pas à l’entretien préalable, le salarié ne commet pas une faute (Cass. soc., 15 mai 1991, n° 89-44.670. – Cass. soc., 28 nov. 2000, n° 98-41.308.– Cass. soc., 28 nov. 2001, n° 99-46.031).

Si le salarié ne se présente pas à l’entretien préalable, la procédure se poursuit normalement et cette absence d’entretien préalable avant la notification du licenciement n’a pas pour effet de priver le licenciement de cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 11 sept. 2012, n° 11-20.371).

 

7- Le défaut d’entretien préalable au prononcé d’une sanction disciplinaire cause nécessairement au salarié un préjudice qu’il appartient aux juges de réparer. Si l’absence de convocation à un entretien préalable constitue une irrégularité de la procédure de rupture du contrat de travail à durée déterminée, elle n’affecte pas le bien-fondé de cette mesure. (Cass. soc., 19 févr. 2014, n° 12-35.305) & (Cass. soc., 14 mai 2014, n° 13-12.071).

 

8- Stipulation d’une période d’essai postérieurement à une promesse d’embauche. L’absence de mention de la période d’essai dans la promesse d’embauche ne fait pas obstacle à l’insertion d’une telle clause dans le contrat de travail. (Cass. soc., 12 juin 2014, n° 13-14.258).

 

9- Licenciement et diffamation. La lettre de licenciement étant une correspondance personnelle, les imputations diffamatoires qu’elle contient ne sont punissables, sous la qualification de diffamation non publique, que si ladite lettre a été adressée dans des conditions exclusives de tout caractère confidentiel. (Cass. crim., 25 mars 2014, n° 12-86.490).

L’employeur qui licencie un salarié en raison d’un comportement qu’il lui reproche doit faire état de ses griefs dans la lettre de licenciement (C. trav., art. L. 1232-6, al. 2).

Lorsque les faits reprochés sont de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération du salarié, l’employeur prend-il le risque de commettre la contravention de diffamation non publique s’il n’est pas en mesure de démontrer la véracité de ses propos ?

Le tribunal de police avait condamné l’employeur pour les  propos litigieux, dont l’employeur n’avait pas cherché à établir la véracité et ne permettaient donc pas à l’employeur de bénéficier du fait justificatif de l’article 122-4 du Code pénal.

La cour d’appel de Versailles, le 17 septembre 2012, a réformé ce jugement et la Cour de cassation lui a donné raison : « les imputations diffamatoires contenues dans une correspondance personnelle et visant le seul destinataire de la lettre qui les contient ne sont punissables, sous la qualification de diffamation non publique, que si ladite lettre a été adressée dans des conditions exclusives de tout caractère confidentiel ».

 

 10- Pas de paiement des heures de délégation lors d’un arrêt maladie sans autorisation médicale. Le paiement des heures de délégation effectuées par un représentant du personnel pendant un arrêt de travail est subordonné à l’autorisation préalable, par son médecin traitant, d’exercer son mandat. (Cass. ch. mixte 21 mars 2014, n° 12-20.002).

Il résulte des articles L. 321-1, 5°, et L. 323-6 du code de la sécurité sociale et des articles L. 2143-17, L. 2315-3 et L. 2325-7 du code du travail, d’une part, que l’attribution d’indemnités journalières à l’assuré se trouvant dans l’incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail est subordonnée à l’obligation pour le bénéficiaire de s’abstenir de toute activité non autorisée et, d’autre part, que les heures de délégation sont de plein droit considérées comme temps de travail.

Il s’ensuit que l’exercice de son activité de représentation par le représentant du personnel ou d’un syndicat, dont le mandat n’est pas suspendu par l’arrêt de travail, ne peut ouvrir droit à indemnisation que s’il a été préalablement autorisé par le médecin traitant.

Sont, en conséquence, cassés les jugements d’un conseil de prud’hommes qui a accueilli les demandes de paiement d’heures de délégation, présentées par deux salariés placés en arrêt de travail pour maladie ou accident de travail, sans constater l’existence d’une autorisation du médecin traitant.

 

11- La seule mise à pied d’un salarié protégé, qui ne suspend pas l’exécution de son mandat, ne constitue pas en soi une entrave aux fonctions représentatives de l’intéressé. Encourt dès lors la cassation l’arrêt d’une cour d’appel qui, pour retenir à l’encontre d’un employeur l’existence d’une faute civile résultant des faits d’entrave poursuivis, énonce, sans caractériser plus précisément les agissements qui auraient entravé les fonctions représentatives d’un salarié protégé, que les mises à pied de ce salarié étaient fondées sur des faits dépourvus de tout caractère fautif et traduisaient la volonté de son employeur de faire obstacle à l’exercice de ses fonctions. (Crim. – 8 avril 2014. N° 12-85.800.)

 

12- Constitue une faute grave,  le fait pour une DRH, de tromper son employeur à deux reprises sur un mois pour obtenir le remboursement de frais indus d’une somme de 1 688 €, ces seuls faits, de la part d’une salariée occupant les fonctions de DRH, étant de nature à rompre la confiance tant à l’égard de l’employeur que du personnel placé sous sa responsabilité (Cass. soc., 9 avr. 2014, n° 13-14.129).

 

13- Constitue une faute grave, le fait pour un aide comptable d’avoir fait parvenir à une jeune femme qui travaillait dans l’entreprise de longs courriers manuscrits, de nombreux courriels dans lesquels il lui faisait des propositions et des déclarations, exprimé le souhait de la rencontrer seule dans son bureau, et fait parvenir des bouquets de fleurs (Cass. soc., 28 janv. 2014, n° 12-20.497).

 

14- Constitue une faute grave, le fait pour un directeur d’agence d’avoir eu à l’égard de plusieurs salariées des propos déplacés à connotation sexuelle et exercé sur l’une d’elles des pressions pour tenter d’obtenir des faveurs de nature sexuelle (Cass. soc., 18 févr. 2014, n° 12-17.557).

 

15- La prise d’acte de rupture du contrat de travail fondée sur des manquements anciens n’est pas fondée. La prise d’acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l’employeur empêchant la poursuite du contrat de travail.

En conséquence, une cour d’appel, qui a retenu que les manquements de l’employeur étaient pour la plupart anciens, faisant ainsi ressortir qu’ils n’avaient pas empêché la poursuite du contrat de travail, a légalement justifié sa décision. (Soc. – 26 mars 2014. N° 12-23.634).

 

 16- N’est pas fondée la résiliation judiciaire demandée sur des manquements reprochés à l’employeur n’ayant pas empêché la poursuite du contrat de travail. Ayant relevé que l’absence de visite médicale de reprise procédait d’une erreur des services administratifs de l’employeur qui n’avait pas été commise lors des précédents arrêts de travail et qu’elle n’avait pas empêché la poursuite de la relation de travail pendant plusieurs mois, une cour d’appel a pu retenir que ce manquement de l’employeur n’était pas suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail et débouter, en conséquence, le salarié de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail. (Soc. – 26 mars 2014. N° 12-35.040).

 

 17- Est fondée la résiliation judiciaire demandée en raison d’une suspension du contrat de travail dépourvue de fondement légal. Une cour d’appel, qui a constaté que la mesure de suspension du contrat de travail décidée par l’employeur n’est fondée sur aucune disposition légale, ce dont il résulte un manquement rendant impossible la poursuite du contrat de travail, ne tire pas les conséquences légales de ces constatations en déboutant le salarié de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail. (Soc. – 26 mars 2014. N° 12-21.372).

 

 

18- La prise d’acte de la rupture par un  salarié protégé produit les effets d’un licenciement nul. Lorsqu’elle est justifiée, la prise d’acte de la rupture du contrat de travail par un salarié protégé, du fait de l’inexécution par l’employeur de ses obligations contractuelles, produit les effets d’un licenciement nul et ouvre droit, au titre de la violation du statut protecteur, à une indemnité forfaitaire égale aux salaires que le salarié aurait dû percevoir jusqu’à la fin de la période de protection en cours.

L’autorisation de licenciement donnée par l’autorité administrative, antérieurement à la prise d’acte justifiée, n’a pas pour effet de priver le salarié protégé du bénéfice de cette indemnité. (Soc. – 12 mars 2014. N° 12-20.108).

 

 19- Est requalifié à temps complet, le contrat de travail à temps partiel qui ne satisfait pas aux  mentions obligatoires prévues à l’article L. 3123-14, du code du travail. Ayant constaté que le titre emploi-entreprise établi par l’employeur ne contenait pas la mention de la durée du travail exigée par l’article R. 133-11 du code de la sécurité sociale alors applicable, ce dont il résultait qu’il ne pouvait être réputé satisfaire aux formalités d’établissement d’un contrat de travail écrit et d’inscription des mentions obligatoires prévues à l’article L. 212-4-3 , devenu L. 3123-14, du code du travail, relatif au contrat de travail à temps partiel, la cour d’appel a décidé à bon droit que le contrat de travail était réputé à temps complet. (Soc. – 5 mars 2014. N° 12-17.809).

 

 20- En cas de dépassement de la durée légale, le contrat à temps partiel est requalifié  en contrat à temps complet. Justifie sa décision, au regard de l’article L. 3123-7 du code du travail, la cour d’appel qui, ayant constaté que le recours à des heures complémentaires avait eu pour effet, fût-ce pour une période limitée à un mois, de porter la durée du travail d’une salariée à temps partiel au-delà de la durée légale, requalifie le contrat de travail de l’intéressée en un contrat à temps complet et condamne l’employeur au paiement d’un rappel de salaire calculé sur cette base. (Soc. – 12 mars 2014. N° 12-15.014).

 

 21- Le candidat aux élections licencié sans autorisation puis élu est protégé pour la durée du mandat. L’employeur qui licencie un candidat aux élections professionnelles sans autorisation de l’inspecteur du travail s’expose à de lourdes sanctions si le salarié est élu en cours de préavis.

 Le salarié qui est licencié sans autorisation administrative après s’être porté candidat à des fonctions électives, et est élu en cours de préavis, doit être considéré comme protégé en qualité d’élu. C’est ce qu’a jugé récemment la Cour de cassation, confirmant ainsi une précédente décision (Cass. soc. 30 juin 2004 n° 01-43.821 : L-VII-44090).

La Haute Cour considère en effet que la rupture du contrat étant irrégulière, la protection aurait dû se poursuivre pendant l’exercice du mandat dont il a été privé par la faute de l’employeur.

En conséquence, dans ce cas, l’indemnisation à laquelle le salarié peut prétendre, au titre de la méconnaissance du statut protecteur, est égale à la rémunération qu’il aurait perçue jusqu’à l’expiration de la période de protection accordée aux représentants du personnel élus, soit quatre ans et demi de salaires. (Cass. soc. 26 mars 2014 n° 13-10.017).

 

22- Il faut tenir compte du dernier avis d’aptitude du médecin du travail pour réintégrer un salarié. La méconnaissance par l’employeur de son obligation de réintégrer le salarié à son poste de travail s’apprécie au regard du dernier avis d’aptitude au poste délivré par le médecin du travail. (Cass .soc. 9 juillet 2014 n° 13-18.696).

 

 23- Le salarié apte avec réserves à la reprise du travail peut signer une rupture conventionnelle. La Cour de cassation a toutefois retenu que sauf à démontrer la fraude de l’employeur ou le vice du consentement, est valable la rupture conventionnelle conclue avec un salarié victime d’un accident du travail et déclaré apte avec réserves à la reprise du travail. (Cass. soc. 28 mai 2014 n° 12-28.082).

 

24- La convention de forfait sur l’année doit fixer le nombre de jours sur l’année.  L’article 19, III, de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 n’a pour objet que de sécuriser les accords collectifs conclus sous l’empire des dispositions régissant antérieurement le recours aux conventions de forfait, et les dispositions de l’article L. 3121-46 du code du travail, issues de la même loi, sont applicables aux conventions individuelles de forfait en jours en cours d’exécution lors de son entrée en vigueur. –  La convention individuelle de forfait en jours doit fixer le nombre de jours travaillés. (Soc. – 12 mars 2014. N° 12-29.141).